Has A Shadow - Sky Is Hell Black

Captcha Records, 2013

Force est de constater que le débarquement fortuit du bien-nommé Christophe Colomb aux Amériques entraîna dans son sillage, à l'instar de l'organe homophone au patronyme du dit navigateur, un déversement fétide de conquistadors, abjectes convoyeurs de funestes augures condamnant de fait quelques unes des civilisations les plus fascinantes que l'humanité ait porté à une fin indigne de leurs génies. Au cœur de ces conquêtes, là où se trouve l'actuel Mexique; Mayas, Aztèques, Totonaques et autres peuples de Mésoamérique vivant au rythme extatique de visions chamaniques et qui auraient pu légitimement disputer au professeur Timothy Leary la paternité du psychédélisme, furent balayés d'un revers de main par la soif d'or et de sang des européens. Plus de 5 siècles après l'effondrement des empires indigènes et alors que Coca-Cola parachève la spoliation de ces terres sacrées en puisant jusqu'à la dernière goutte d'eau des nappes phréatiques mexicaines pour engraisser des générations entières de névrosés élevés au narcissisme libertaire et qu'il ne reste de l'âge d'or des Mayas qu'une lecture grotesque de leur calendrier destiné à abrutir un peu plus ces mêmes générations à coup de blockbusters pompiers et risibles, nous pensions tout espoir de retrouver l'âme de ces antiques civilisations perdu. Et pourtant, sorti du ciel noir comme l'enfer de Mexico, ville jouissant du triste honneur d'être la plus polluée au monde, a récemment émergé Has A Shadow, parfait syncrétisme à la croisée des spiritualités précolombiennes et de la musique psychédélique moderne. Récemment signé sur Captcha Records aux côtés notamment de leurs non moins talentueux compatriotes Lorelle Meets The Obsolete le groupe offre avec son premier album "Sky Is Hell Black" l'une des plus belles pépites de cette année...

Obviously the fortuitous landing of Christopher Columbus in the Americas, bringing in its wake the arrival of the conquistadors, abject conveyors of ill omens, condemned some of the most fascinating civilizations that humanity has known to an end unworthy of their grandeur. At the heart of the conquest the New Word, where is currently located Mexico; Mayan , Aztec , Totonac and other Mesoamerican peoples living at the ecstatic rhythm of shamanic visions and which could legitimately argue the paternity of psychedelia to the Professor Timothy Leary, were swept away by the thirst of gold and blood of the European. More than five centuries after the collapse of these civilizations, whereas Coca -Cola completes the plundering of these sacred lands by drawing the Mexican aquifers until the last drop of water to fatten generations of narcissic neurotic, and all it remains from the Mayan's golden age is a grotesque reading of their calendar inspiring ridiculous blockbusters for those same generations, we logically thought that all the hope for finding the soul of these ancient civilizations was lost. And yet, out of the black sky of Mexico City, Has A Shadow has recently emerged, perfect syncretism at the meeting point of pre-Columbian spiritualities and modern psychedelia. Recently signed on Captcha Records alongside their talented compatriots of Lorelle Meets The Obsolete, the band offers with its first album " Sky Is Hell Black" one of the most beautiful gems of this year...

Dès les premières secondes du disque nous voilà transporté à Teotihuacan, un soir d'éclipse lunaire. Dans les coulisses de ce théâtre surréaliste, au sommet de la pyramide du Soleil, se déroule une cérémonie mystique, un sacrifice rituel sous la lumière rouge du satellite terrestre. Absorbé dans les vertiges d'un orgue fuzz, on gravit péniblement les 245 marches de l'édifice. Soudain un bûcher s'enflamme au son assourdissant des guitares et de la batterie. Pour invoquer les esprits, pour laver l'homme de ses chimères tyranniques et récolter le fruit mûr de son âme épanoui, on sacrifie l'incarnation du paradoxe humain, le génie aux rebellions puériles, la vedette aux aspirations spirituelles; on immole John Lennon au feu de la grâce et du vice. Notre cœur s'emballe alors d'une excitation morbide devant le sinistre spectacle du brasier qui consume le martyr et emporte dans les nues son corps et son esprit.  Une fois la rédemption offerte au public par cet acte cathartique, le cérémonial peut commencer dans cet atmosphère chargée de mystère, de miasme et d'épaisse fumée noire avec Sky is Hell Black.
Un étroit passage se forme dans l'immense foule rassemblée dans la citadelle afin de laissé passer un étrange prêtre au visage peint et coiffé d'un immense chapeau à plume. Dans le fracas des tambours, sur un rythme implacable qu'un orgue anachronique vient ponctuer de mystère, le sorcier parvenu au sommet de la pyramide prépare un breuvage aux parfums enivrant dans une danse syncopée au milieu des volutes de fumées du copal qui brûle à ses pieds. La potion prête, les percussions ralentissent et nous plonge dans l'ambiance pesante de Don't, apparaissant comme un message prémonitoire au vue de ce qui nous attend. Car bientôt l'angoisse nous envahit lorsque l'on comprend que le prêtre qui avance lentement en fixant les étoiles, un bol fumant plein de son étrange mixture dans ses bras tendus, vient en réalité à notre rencontre. En un instant, sans que l'on eu puis dire comment, on se retrouve avec le récipient dans les mains à hauteur de la bouche. Comment dire non à ce fou qui vous dévisage avec insistance ? A peine la première gorgée de ce liquide amer est avalée que d'intense bouffée de chaleur parcourt notre carcasse jusqu'à gagner notre précieux encéphale.
Puis c'est le noir complet. Une absence de quelques seconde. Une éternité, qui prend fin avec les premières notes de guitare de Can't Stop The Fall. Notre corps tout entier est une étuve qui monte en pression au son lointain d'une cloche. Irrésistiblement aspiré vers d'obscurs profondeurs, on fond, s'effondre sur nous même et finalement, avec la précipitation des tours jumelles du World Trade Center, on disparaît dans un nuage de poussière. Ici prend fin le règne hégémonique de l'Empire de la raison.
Flottant dans cet épais brouillard, on nage béat dans les eaux troubles de May Never comme perdu en apnée dans notre propre ego, submergé de milliers d'idées qui vont et viennent plus vite que les mots et nous effleure avec la douceur d'un spiritueux.
Dans ce dédale de confusion se dessine au loin une issue. Au rythme hypnotique de Drive on se retrouve alors propulser à la vitesse du sang dans nos veines dans une galerie qui semble se prolonger à l'infini en fractal de visions kaléidoscopiques. Le clavier sublime guide nos spasmes tandis qu'on perçoit au loin les chants des spectateurs qui admirent notre transe. Allongé au sommet de la pyramide on ne distingue de notre être chahuté que deux billes écarlates, le reflet éclatant de la lune rouge dans nos pupilles dilatées.
Mais bientôt les spasmes deviennent convulsions et les images psychédéliques qui coloraient nos visions font place aux ténèbres. Avec Poison In Me la musique nous ébranle comme une opération à cœur ouvert. Et dans le délire qui nous habite et nous tourmente on jurerait entendre, derrière le chaos des guitares et des percussions, la célèbre phrase de Paracelse "Alle Dinge sind Gift, und nichts ohne Gift, allein die Dosis macht das ein Ding kein Gift ist". Mais l'insidieuse potion perd finalement son emprise sur notre être et la noirceur qui teintait notre esprit se dissipe à la lumière d'une vérité nouvelle. Une épiphanie.
On réouvre alors les yeux sur The Way, les poumons gonflés d'une profonde sérénité, hanté par la mélodie que joue une guitare et qui vient judicieusement révéler l'état de transcendance qui nous habite désormais. Sous le regard admiratif de la foule on descend la pyramide d'un pas résolu comme investi d'une mission. Notre quête n'a pas de nom. C'est une voie qui se dessine à chaque à pas vers et nous conduit vers des horizons inconnus. Mais désormais la force qui motive chaque mouvement est porté par un état de grâce inébranlable. Apaisé et confiant on regarde lentement le soleil se lever au bout de l'Allée des Morts, dans le doux écho de Untitled.

From the first seconds of the record we are transported to Teotihuacan, a night of lunar eclipse. In the backstages of this surreal scene, at the top of the pyramid of the Sun, a mystical ceremony takes place, a ritual sacrifice in the red light of the terrestrial satellite. Absorbed into the dizziness of a fuzz organ, we painfully climbed the 245 steps of the edifice. Suddenly a pyre ignites to the deafening sound of guitars and drums. To invoke the spirits of the ancient, to wash the man of his tyrannical chimeras and harvest the ripe fruit of his radiant soul, we sacrifice the incarnation of human paradox, we burn "John Lennon". A morbid excitement takes over our heart in front of the show of the fire consuming the martyr. The redemption is offered to the public by this cathartic act and now the ceremony can begin in this atmosphere full of mystery, miasma and thick black smoke with "Sky is Hell Black".
A narrow passage appears in the immense crowd gathered in the citadel to let pass a strange priest with a painted face and a huge feathered hat. In the crash of the drums, at a relentless pace that an anachronistic organ punctuates with mystery, the sorcerer who reached the top of the pyramid is preparing a curious potion in a syncopated dance in the clouds of smoke of the copal burning at his feet. Once the elixir ready, the percussion slowdown and plunge ourselves into the heavy atmosphere of "Don't", which sounds like prophetic message in this adventure.
Soon the dread takes over us when we understand that the priest who's slowly walking while staring at the stars, a steaming bowl full of its strange mixture in his hands, actually comes to meet us. How to say no to this psycho that stares at you with ? As soon as the first sip of that bitter liquid is swallowed that intense hot flushes run through our poor carcass and finally reached our precious brain.

Then it's a blackout. An absence of a few seconds. An eternity ending with the first guitar notes of "Can't Stop The Fall". Our whole body is an oven rising in pressure to the distant sound of a bell. Irresistibly drawn into dark depths, we finally disappear in a cloud of dust with the precipitation of the World Trade Center's twin towers. Here ends the hegemonic reign of the Empire of the reason.
Floating in this thick fog, we blissfully swim in the troubled waters of "May Never" as if we were snorkeling in our own ego, flooded by thousand ideas that come and go faster than words and touches us with the sweetness of spirits.
In this maze of confusion appears an exit. Following the hypnotic rhythm of "Drive" we are propelled at the speed of the blood in our veins into a gallery that seems to infinitly extend into a fractal  of kaleidoscopic visions. A sublime keyboard guide our spasms  whereas we perceive the distant chants of the audience who admire our trance. Lying on the top of the pyramid, all we can see of our poor body is two scarlet marbles, the bright reflection of the red moon in our dilated pupils.
But soon our sweet spasms turn into convulsions and the psychedelic images which used to color our visions fade away into gloomy darkness. With "Poison In Me"  the music become an open-heart surgery. In our delirium we'd swear we could hear, behind the chaos of guitars and drums, the famous words of Paracelsus "Alle Dinge sind Gift, und nichts ohne Gift, allein die Dosis macht das ein Ding kein Gift ist". But the insidious potion finally loses his grip and the darkness in our mind is dissipated in the light of a new truth. An epiphany.

We reopen our eyes on "The Way", our lungs inflated of a deep serenity and haunted by the melody of the guitar that comes to reveal the state of transcendence which we are now experiencing. Under the admiring gaze of the crowd, we go down the pyramid determined as a prophet on a mission . Our quest has no name. It is only a path that emerges step by step towards unknown horizons. But from now on, the force that motivates each movement is supported by an unwavering state of grace. Thus, peaceful and confident, we're slowly watching the sun rise at the end of the Avenue of the Dead, drown the soft echo of "Untitled".

Si vous étiez trop ou trop peu sobre pour vous infligé la lecture de cette interminable récit délirant
 et que vous avez décidé de sauter directement à la conclusion, nous serons bref: Amoureux transi des Dead Skeletons et A Place To Bury Strangers ? Épigone fervent du microcosme psychédélique ? Simple oiseau de passage ? Écoutez "Sky Is Hell Black", goûtez au voluptueux mur de son de ces génies mexicains et donnez à votre âme de quoi étancher sa soif de mysticisme. Sans doute l'album de l'année 2013.

If you were not enough or too sober to inflict to yourself the reading of this interminable and extravagant story and you have decided to jump to the conclusion, we will be brief: Lovers of  the Dead Skeletons and A Place To Bury Strangers? Fervent epigone of the psychedelic microcosm? Simple bird of passage? Listen to "Sky Is Hell Black", enjoy the voluptuous wall of sound of these Mexican genius and give your soul something that will quench its thirst for mysticism. Certainly the album of the year 2013.




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